La 31e cérémonie des prix Ig Nobel qui récompensent des recherches scientifiques insolites s’est tenue jeudi aux Etats-Unis. Dans le palmarès 2021, figure une équipe internationale dont l’étude visait à déterminer s’il est plus prudent de transporter un rhinocéros par les airs la tête en bas ou allongé sur le côté.
Récompenser des recherches qui font rire mais aussi réfléchir. Telle est la vocation des Ig Nobel, prix parodiques des célèbres prix Nobel imaginés par le magazine scientifique humoristique Annals of Improbable Research (en français, les Annales des recherches improbables). Chaque année, dix prix sont attribués à des études scientifiques menées sur des sujets en apparence loufoques mais bien sérieux.
Jeudi 9 septembre, aux Etats-Unis, a eu lieu la 31e cérémonie des Ig Nobel qui, pour la seconde année consécutive, a dû se tenir en ligne, contexte sanitaire oblige. Mais ça n’a pas empêché les organisateurs d’y tenir des présentations farfelues, y compris un mini-opéra, dignes de leur réputation. Ni de dévoiler un palmarès 2021 haut en couleurs.
En témoigne le prix de transport attribué à une équipe internationale pour leurs recherches publiées en 2021 dans la revue Journal of Wildlife Diseases. Des travaux dont l’objectif était de déterminer s’il était plus bénéfique pour un rhinocéros noir d’être transporté la tête en bas par les airs ou allongé sur le côté par voie terrestre.
Verdict : la première option n’affecterait pas plus la fonction pulmonaire des mammifères que la seconde. En revanche, la suspension par les pieds semble augmenter légèrement plus les échanges gazeux que le transport latéral. La technique ne serait donc pas dépourvue d’avantages pour les rhinocéros dont le poids peut facilement dépasser la tonne.
Une question cocasse, des conclusions sérieuses
Cette étude illustre parfaitement les traditionnels lauréats des Ig Nobel. Si ses conclusions peuvent faire sourire, elles sont en effet tout à fait sérieuses et importantes. Car dans certains pays, des rhinocéros sont bel et bien transportés parfois par des hélicoptères pour être relocalisés à d’autres endroits.
Pour ce faire, des tranquillisants sont administrés aux mammifères qui sont ensuite transportés par les pieds, les yeux bandés. Or, jusqu’ici, aucune étude ne s’était penchée sur les effets cliniques d’une telle opération, des anesthésiques administrés, ni sur les potentiels effets secondaires une fois l’animal réveillé.
“Ces médicaments sont des opioïdes puissants – mille fois plus puissants que la morphine, avec des effets secondaires qui incluent une détresse respiration, une baisse d’oxygène dans le sang et un métabolisme plus élevé“, a expliqué dans un communiqué le Dr. Robin Radcliffe, principal auteur de l’étude lors de sa publication.
“Ces effets secondaires peuvent affecter la santé du rhinocéros et même conduire à la mort durant la capture et la translocation“, a-t-il ajouté. C’est pour explorer leurs conséquences que ce spécialiste et son équipe ont mené des expériences sur douze rhinocéros noirs dans le parc national de Waterburg en Namibie.
Un trophée et 10 billions de dollars zimbabwéens
“Nous avons observé que suspendre les rhinocéros par leurs pieds est plus sûr qu’on ne pensait“, a-t-il indiqué. Une bonne nouvelle pour les protecteurs de l’environnement qui emploient cette technique. La prochaine étape va consister à poursuivre les expériences afin d’observer les effets sur de véritables transports en hélicoptère et donc des durées de suspension plus longues.
Comme tous les lauréats des Ig Nobel, le Dr. Radcliffe et ses collègues se sont vus remettre un trophée (en kit) et un billet de 10 billions de dollars zimbabwéens (sans aucune valeur) par un véritable prix Nobel, le biochimiste Richard Roberts. Interrogé sur ce qu’il allait faire de son “butin”, le spécialiste a répondu, en riant, être “toujours en quête de subventions“.
“Quand j’ai entendu parler de l’Ig Nobel pour la première fois, je n’étais pas sûr que ce soit bon ou mauvais”, a-t-il reconnu. “Mais je pense que ce message que “cela vous fait rire puis penser” est exactement ce dont il s’agit pour nous. De plus en plus de personnes devraient comprendre quels efforts sont mis en place pour sauver ces animaux extraordinaires qui vivent avec nous“.
Des vocalisations du chat aux bactéries de chewing-gums
Les neuf autres récompenses sont tout aussi dignes que la première en matière d’insolite. Le prix de biologie a été attribué à la chercheuse suédoise, Susanne Schötz, pour ses études acoustiques sur les ronronnements, miaulements, gazouillis, sifflements et autres vocalisations des chats.
Du côté de la physique et de la cinétique, ce sont deux équipes différentes qui ont été primées pour leurs travaux respectifs publiés en 2018 et en 2021 sur un sujet similaire, à savoir pourquoi les piétons ne se heurtent pas constamment à d’autres piétons et inversement pourquoi cela arrive occasionnellement.
Autres exemples cocasses : le prix d’écologie attribué à une équipe pour avoir étudié les différentes espèces de bactéries présentes dans les résidus de chewing-gums collés sur les trottoirs dans différents pays. Ou encore le prix de la paix décerné à des recherches visant à déterminer si les humains ont développé une barbe pour se protéger des coups au visage.
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