PIERRE DIOH, Maire Adjoint, Promoteur des projets GIVAD (Gestion Intégrée et Valorisation des Déchets dans la Commune de Joal-Fadiouth) et GAVAD (Gestion Améliorée et Valorisation Agricole des Déchets dans les Communes de Joal-Fadiouth et de Mbour.)
«Le projet GAVAD pallie les limites de la gestion traditionnelle des déchets»
Quoi de vert ? : La pression démographique et le solde migratoire assez élevé rendent complexe la gestion des externalités négatives. Avez-vous des données sur la production de déchets actuelle dans les localités que couvre le projet GAVAD ?
Pierre Dioh : Une idée sur des quantités en tonnage, non. Mais quand on a démarré le projet, on avait déjà quantifié, au niveau des ménages, quelle était un peu la production. Maintenant, il faut qu’on retrouve ces chiffres et qu’on les multiplie par le nombre de la population, pour avoir une idée.
Mais je pense qu’il n’y a pas à trouver un tonnage. En se promenant, on se rend compte que les villes de Joal et de Mbour sont des zones de concentration et d’externalité, du fait de l’activité de pêche qui attire une très forte migration. Et quand on parle d’externalités négatives, ici, c’est surtout le plastique et les ordures ménagères. Les gens mangent dans la rue, parce que, socialement aussi, ils ne s’en rendent pas compte. Quand vous êtes dans une ville de migration, les populations sont dans des conditions précaires, et elles produisent plus d’ordures. Ce sont des gens qui sont les plus compliqués à gérer, parce que quand les ordures sont générées dans les foyers, c’est possible de les collecter et cela ne pose pas de problème. Mais quand elles sont générées par des gens qui sont là aujourd’hui, là-bas demain, qui n’ont pas de domicile fixe, qui ne s’attachent pas trop à un milieu géographique bien précis, il est difficile de gérer ces ordures-là.
Quand une partie des ordures est générée au niveau domicile et une autre partie régulièrement à travers les restaurants et les vendeurs ambulants, à travers ces gens qui mangent dans la rue, il y a des facteurs aggravants qui rendent complexe la gestion des ordures dans des villes comme Joal et Mbour, qui sont des villes de pêche.
Comment avez-vous accueilli le projet GAVAD ?
Le projet GAVAD, nous ne l’avons pas accueilli, c’est nous qui l’avons promu. Nous en sommes les promoteurs. Il est né d’un projet-pilote qu’on avait déjà essayé à Joal, sur deux quartiers : Ndiong et Mbelegnuim. C’est là-bas qu’on a testé ce qu’on est en train de faire aujourd’hui en grandeur nature, dans la ville. C’est parce que ça avait fonctionné au niveau de ces quartiers qu’on s’est rendu compte qu’une approche communautaire est l’avenir de la gestion des ordures dans les petites villes comme Joal. Je ne sais pas si cette approche est faisable dans les grandes villes comme Dakar, Saint-Louis ou Thiès, mais dans des villes comme la nôtre, il est non seulement possible de gérer les ordures, de les maîtriser, mais aussi de créer des emplois et des richesses tout en assainissant l’environnement.
Malgré les habitudes cultivées, la gestion des ordures ménagères est une compétence transférée. Qu’est-ce qui a bloqué le système traditionnel de la gestion des ordures ménagères ?
Ça n’a pas bloqué. En fait, le projet GAVAD est une réponse aux limites qu’on a constatées dans la gestion traditionnelle des déchets dans les collectivités locales. En tant que compétence transférée, ce que toutes les communes du Sénégal qui avaient les moyens faisaient, c’était d’acheter un camion et de collecter quotidiennement les ordures le long de la route. On s’est rendu compte que cela ne marchait pas. Dans une ville comme Joal, on se rend compte qu’il y a un dessin longiligne avec une seule route goudronnée. Avec 15 tonnes de poids sans les ordures, ces camions ne peuvent pas aller dans les zones sablonneuses. Si vous allez à Mbour, vous avez une zone qui s’étend sur des milliers d’hectares où il n’y a pas de route goudronnée. Cela veut dire que si le camion s’aventure en dehors de la route, il s’embourbe. Ça, c’est un premier facteur qui explique pourquoi ce système traditionnel dont vous parlez a bloqué.
Ici, compte tenu de la longueur de Joal, le camion qu’on avait, quand il prenait départ à la mairie, il ne peut pas aller à Fadiouth, qui est une partie intégrante de la ville, mais malheureusement insulaire. Ce qui veut dire que Fadiouth à lui seul justifie le fait qu’on puisse réfléchir à un système communautaire de gestion des ordures.
Mais dans le cas précis de la ville de Joal qui s’étend pratiquement sur 5 km de long, vous prenez un camion avec une benne le lundi matin, parce que les fonctionnaires ne travaillent pas les week-ends, même s’ils n’ont pas le même statut que les autres fonctionnaires, parallèlement, c’est les jours où les populations sont dans leur foyer, subséquemment, et ce sont les jours où il y a le plus d’ordures et le système ne fonctionnent pas. Ce qui veut dire que pendant deux jours, il n’y a pas de collecte d’ordures.
Le lundi, quand le camion commence la collecte des ordures, avant de faire le tiers de Joal, il est plein. Donc il faut aller décharger. A 16 h, quand les gens descendent, ils n’ont pas fait la moitié de Joal. Ce qui veut que dans certains quartiers, surtout ceux qui sont au bout de la ville ou sur les 2 derniers kilomètres, les ordures du samedi, du dimanche et du lundi n’ont pas été collectées, et celles du mardi sont encore dans la rue, parce que le camion n’est pas venu depuis vendredi. Car les gens n’ont pas travaillé le samedi et le dimanche, et le lundi, ils n’ont pas pu terminer le circuit. C’est ce qui explique la présence, au bout de la ville, des tas d’ordures.
Parallèlement, en plus des animaux errants qui viennent culbuter les bacs à ordures, les femmes n’ont pas envie de se faire voler leurs poubelles. C’est ce système-là qui a échoué. On s’est rendu compte que le système de collecte avec des camions à benne ne marche pas parce qu’il y a des jours qui sont où fériés ou non-ouvrables et l’on ne peut pas obliger les gens de la voirie qui sont des fonctionnaires à aller travailler.
Donc, le projet GAVAD est une réponse à ce système-là. La gestion des déchets est une compétence qui appartient à la commune qui est, par extension, la communauté de Joal. C’est la population, c’est le quartier. Au nom du principe de subsidiarité, on a demandé aux gens d’appliquer la compétence qui était revenue à la mairie et que cette dernière ne pouvait pas assumer, compte tenu des problèmes techniques dont je viens d’évoquer. Donc, au lieu de faire une collecte traditionnelle qui a échoué partout, même à Dakar, on va faire une collecte communautaire.
A quoi consiste la collecte communautaire ?
Elle est simple. Nous avons demandé aux quartiers de gérer leurs ordures eux-mêmes. En quoi faisant ? Nous avons éliminé le véhicule. Nous avons donné à chaque quartier une charrette et un âne ou deux charrettes et un âne, selon sa dimension et celle des foyers. La charrette collecte les ordures du quartier uniquement.
Nous avons demandé aux populations de participer à cet effort, indépendamment de la TOM (Taxes sur les ordures ménagères) qui est versée. La participation est de 500 à 1 200 F CFA par foyer et par mois. Selon un processus de communication et de sensibilisation qui a duré plus de deux ans, nous avons installé des comités de salubrité autonomes dans chaque quartier. Ces comités gèrent la charrette et le matériel qui a été mis à leur disposition par la mairie. C’est-à-dire l’âne, la charrette et le petit matériel. Le charretier devient un salarié du quartier. Tous les foyers payent et c’est le quartier qui gère son argent. A la fin du mois, quand le charretier est payé, il leur reste de l’argent dans les caisses et le quartier est propre. Quand les charretiers se lèvent, ils collectent toutes ordures de tous les quartiers facilement avant 11 h. C’est ce système-là qu’on a essayé comme projet-pilote au niveau de Mbélégnème et de Ndiong, et qui a marché. Il nous a fallu 3 millions de l’ONG Tostan pour faire ce projet pendant 2 ans.
Quel sort réservez-vous aux ordures collectées ?
Les ordures ont une valeur et nous avons rajouté la partie valorisation en faisant du compost. La nécessité de faire du compost donne une autre obligation, celle de trier les ordures. Nous avons réussi à convaincre les populations à trier les ordures à domicile. Ainsi, ce qui est compostable va dans une poubelle rouge et ce qui ne l’est pas et qui pourrait faire aussi l’objet de valorisation est recueilli dans une autre poubelle.
Donc le projet GAVAD prend en compte la gestion communautaire des déchets et leur valorisation en aval. C’est ce qu’on a réussi à faire à Mbélégnème et à Ndiong et que la mairie a continué à faire à travers des financements propres dont certains nous venaient de l’Italie, de l’ambassade des Etats-Unis et de l’USAID d’autres de WWF.
Ensuite, nous avons étendu le projet à quatre autres quartiers sur fonds propres. C’est compte tenu de cette expérience qu’on a eu l’appui technique d’APTE qui nous a aidé à monter un projet qu’on a soumis à l’Union européenne et qui a été financé. C’est le projet GIVAD. Mais son financement ne couvrait pas toute la ville de Joal. Quand vous faites le système sans couvrir toute la ville, c’est comme si vous ne faites rien. Parce que s’il y a une partie qui est propre et une autre qui ne l’est pas, les ordures des quartiers sales vont contaminer ceux qui sont propres. C’est comme dans la médecine, si vous mettez ensemble quelqu’un qui est malade et quelqu’un qui ne l’est pas, le sujet malade va contaminer le sujet bien portant. C’est alors qu’on a eu la chance et l’opportunité, avec l’appui des experts d’APTE de proposer un autre projet qui a été encore financé par l’Union européenne, avec des arguments convaincants. C’est vrai qu’on avait un document qui était bien ficelé, en plus de notre expérience du terrain et qu’on a essayé de vendre à plusieurs communes du Sénégal. Je vous garantis qu’il y a eu plus de 100 communes qui sont venues ici s’imprégner de cette expérience, y compris des communes d’arrondissement de Dakar. On en a eu plus de 80 qui nous viennent de Kaolack, Tamba et qui sont encadrées par le projet CARITAS., mais aussi des éco-villages. Et beaucoup de communes sont en train de tenter cette approche.
Pour résumé c’est une gestion communautaire qui permet aux populations de gérer leurs ordures et que la mairie s’occupe de deux choses : en amont, elle donne l’équipement à travers les ânes, les charrettes et le petit matériel de collecte. En aval, elle s’occupe de la valorisation.
La mairie crée des centres de compostage et des centres de dépôts des 5 ou 6 % qui vont rester et qui ne sont pas valorisables, c’est-à-dire la ferraille, les éclats de verre, etc.
Aujourd’hui, nous y avons même ajouté une autre dimension : la gestion du plastique. Nous avons actuellement la capacité technique et financière de gérer le plastique pour qu’il disparaisse de Joal, même si l’Etat pense faire une loi. Je pense que ce n’est pas une loi qui va régler la problématique du plastique, mais plutôt un comportement. Si vous prenez la drogue, malgré son interdiction, elle est omniprésente au Sénégal.
GAVAD est une réponse aux limites de la gestion traditionnelle certes, mais ce matin, en arrivant à Joal, nous avons aperçu la présence des tas d’ordures à l’entrée. Pourquoi ?
C’est lié au fait que le projet est en cours et qu’il n’est pas fini. On a un projet qui est un peu dangereux, parce qu’il ne peut marcher que quand toute l’infrastructure sera mise en place. Et malheureusement les projets ne fonctionnent pas comme ça. Dans la planification, on n’a pas pu mettre toute l’infrastructure sur place tout de suite.
L’infrastructure c’est deux choses : il y a le matériel qui est destiné à la communauté pour la collecte des ordures et celle qui est destinée au traitement des ordures. Du point de vue des communautés, on a tout donné, et même des sacs pour collecter le plastique au niveau du foyer.
Mais aujourd’hui, dans la zone de Santhie, on n’a pas encore mis sur place les centres de compostage. S’il n’y a pas de centre de compostage, il n’y a aucune raison de demander aux gens de trier les ordures. Et quand ils ne trient pas, parfois vous retrouvez les ordures dans la rue.
Mais quand vous rentrez dans les quartiers qui sont aux alentours de la mairie, il n’y a pas ce phénomène, parce que le projet est parti de ces zones vers la zone de Santhie qui est plus compliquée. On est parti des quartiers traditionnels où il y a plus de connaissance, plus de cohésion sociale, où il y a plus de stabilité sociale. Parce que les populations traditionnelles de Joal vivent-là. Et c’est différent. Quand vous allez dans les villes comme Mbour et Joal, les habitants et les gens qui y vivent n’ont pas le même comportement. La personne qui habite dans les quartiers de Ndiong ou de Mbourdiouham, n’est là parce que son papa, sa maman et son grand papa étaient tous-là. Cette personne s’occupe de son environnement. Et quand vous lui donnez une solution comme GIVAD ou GAVAD, cette population adhère automatiquement. Parce qu’elle y trouve son compte du point de vue de la salubrité et de la vie sociale. Si vous allez dans ces quartiers, les populations ont des «Nguel», des places publiques où elles se retrouvent pour faire vivre ce ciment social.
Or, quand vous allez dans les quartiers d’extension, cette vie sociale n’existe pas. Ce sont des Kadjor-Kdjor, des Baol-Baol, des Diolas, des Toucouleurs qui sont venus pour la pêche.
Comparée à plusieurs autres villes du Sénégal, Joal reste une petite ville. Quelles solutions définitives pour parvenir à ménager ces quartiers d’extension ?
La ville de Joal a quadruplé en moins de vingt ans. C’est très rare au Sénégal.En 1981, cette ville s’arrêtait à peu près à 100 m de la gendarmerie. Le tracé allant du quartier des HLM jusqu’au port n’existait pas.
Aujourd’hui, les trois-quarts de la population de Joal habitent dans la zone d’extension. A titre d’exemple, puisqu’on est dans un contexte d’élection locale, je vous donne un chiffre qui va être facile à calculer. La population électorale de Joal tourne autour de 18 000 électeurs. A Fadiouth, nous avons à peu près 1 000 électeurs. Dans les quartiers traditionnels de Joal, ils sont environ 5 000 électeurs. Pour un total de 6000 électeurs. Les 12 000 électeurs qui restent sont dans des zones qui n’existaient pas. A la place, il y avait une forêt en 1981. Après les mauvaises récoltes de 1981, c’est l’Etat du Sénégal, à travers l’armée qui a aidé la commune de Joal à faire un lotissement. Une grosse partie de cette population n’est pas encore stabilisée à Joal. Parce que vous savez aussi bien que moi que les pêcheurs migrent en fonction des saisons. C’est ce qui fait qu’on note la présence des Guinéens, des Burkinabè, des Maliens, pour au moins 6 mois. Même s’il y a certaines espèces qui sont péchées saisonnièrement, à Joal, la pêche est continuelle.
Parallèlement, les activités de la transformation qui concernent à 80 % la sardinelle, amènent les femmes à s’installer ici. A cela s’ajoute toutes les populations des villes aux alentours qui n’ont rien à faire après l’hivernage et qui viennent à Joal où elles peuvent facilement trouver des emplois, de l’argent et surtout de la nourriture à très bon marché. Une grosse partie de cette population n’est pas stable.
Pour la petite histoire, lors du dernier recensement, il arrivait qu’un agent fasse quatre ou cinq aller-retour dans une maison, avant de tomber sur ses occupants ; ils ne sont jamais là. Ces gens-là, il est difficile de les gérer. Le système est basé sur le principe du chef de la famille. On dit que cette maison appartient par exemple à Mme Dia. Donc quand on fait le recensement c’est le chef de famille qu’on recense. Si vous allez à Santhie, vous trouvez une maison avec 6 pièces ; en dehors du propriétaire qui est absent, il n’y a que des locataires, ce sont des pêcheurs. Ils ne sont jamais là. Quand ils arrivent, c’est pour se débarrasser de leurs bagages, aller dans les restaurants, dans les bars se défouler. Ces pêcheurs, au bout de quelques mois, s’en vont. On ne peut pas les gérer et c’est eux qui génèrent beaucoup plus d’ordures.
L’aspect social qui permet au quartier d’être cohérent et bien organisé autour du comité de salubrité pose aussi problème. Dans les quartiers traditionnels comme Mbélégnème et Ndoubab qui abritent des «Ngeul» ou tout le monde se connaît, dans les quartiers d’extension comme Santh les gens ne se connaissent pas. Sur 10 personnes, le délégué de quartier ne peut identifier que 4 ou 5 individus. Et quand vous voulez faire un projet sur une base communautaire, il faut que la communauté existe socialement. Je n’ose pas prononcer le mot périphérie, ce sont des Joaliens à part entière, mais l’absence d’infrastructures, le problème ardu de la sensibilisation, et de la cohésion sociale rendent difficile la manœuvre dans les quartiers d’extension.
Mais nous espérons que quand nous aurons mis les infrastructures sur place et en mettant en synergie nos efforts, on pourra corriger toutes ces difficultés.
Avez-vous identifié des pistes de solutions ?
Nous sommes en train d’installer deux infrastructures et il y a un troisième chantier qui n’est pas encore ouvert. Quand on aura terminé toutes ces infrastructures, ça sera plus facile. On va reprendre la sensibilisation. On s’est aussi adossé sur un projet d’ENDA-Santé qui est ici à Joal et qui travaille dans le cadre de la santé avec une approche environnementale.
Je pense que la priorité ce n’est pas de soigner les gens, mais c’est d’éviter qu’ils tombent malades. On sait qu’à Joal, la santé est intrinsèquement liée à l’environnement. Aujourd’hui, nous avons un protocole d’accord qui nous lie. C’est dans ce cadre qu’on a formé 26 relais. Des Joaliens qui sont installés ici et qui sont répartis dans les différents quartiers. Et on a fait de telle sorte qu’à la fin du projet, qu’ils puissent continuer à faire cette sensibilisation. C’étaient déjà des relais communautaires qui étaient sur le terrain, mais à qui on a renforcé, en termes de gestion des ordures et de l’environnement.
Nous envisageons aussi d’initier un certain nombre de formations pour que les comités de salubrité fonctionnement mieux. Le projet qui va au-delà de la communauté pose aussi le problème de la participation, de la démocratie et le devoir de rendre compte. Une partie de la population adhère parce qu’elle sait que c’est transparent. L’autre partie refuse parce qu’elle se dit qu’elle ne sait pas où va l’argent. Ce n’est pas seulement les politiciens ou l’administration qui doivent rendre compte, c’est une demande des populations qui sont à la base. Cette demande tourne autour de la transparence et de la démocratie. Dans ce sens, avec les experts qui viendront, nous tiendrons des ateliers de formation pour apprendre aux gens à rendre compte régulièrement pour permettre deux choses :
– convaincre les gens qui hésitent parce qu’ils pensent que l’argent va être bouffé,
– faire fonctionner le projet, parce que si le charretier ne travaille pas, le projet ne fonctionne pas. Et si ce dernier n’est pas payé, il ne travaille pas. Son salaire dépend du payement de chaque foyer. Même s’il existe, dans certains quartiers, des foyers qui n’ont pas la capacité de payer du fait de la pauvreté extrême, socialement la communauté doit les soutenir et continuer à enlever. Parce que si on l’exclut du système de collecte, ses ordures vont rester dans la rue.
– Au niveau des quartiers d’extension, même si on n’a pas la même ambition, je pense qu’il nous faut trouver une masse critique pour que les gens qui participent au projet soient un peu plus nombreux. De ce fait, ceux qui ne participent pas vont être gênés et participer à leur tour.
Nous sommes dans un contexte d’élection locale. Quel bilan pouvez-vous mettre sur la table pour mériter à nouveau la confiance de la population de Joal-Fadiouth ?
La question que vous posez est compliquée, parce que le contexte de Joal est particulier. Le maire titulaire de Joal est sortant. Mais je pense me prévaloir d’un certain nombre d’acquis.
Du point de vue politique, je pense que c’est un projet porteur, parce que pratiqué dans les foyers. Ce sont des femmes qui nous voient chaque jour venir leur parler, leur donner des poubelles quasi gratuitement. Des quartiers qui nous voient leur fournir des charrettes, remplacer les ânes morts, assurer la formation et les sensibiliser, les aider à assainir leur environnement.
De ce point de vue, le projet est porteur politiquement.
Après la fermeture de la décharge de Mbeubeuss et malgré le refus des populations, quels regards portez-vous sur la sur l’implantation du site de Sindia ?
Vous avez posé deux choses : la fermeture de Mbeubeuss d’abord. Du point de vue environnement, c’est un processus qu’on ne peut pas arrêter. Il faut que Mbeubeuss disparaisse. Le refus des populations au niveau de Sindia a peut-être posé un problème de communication et d’incompréhension. Mais je pense que l’Etat doit aller plus loin. La décharge de Mbeubeuss est grande parce qu’on ne gère pas les ordures. Aujourd’hui, l’avenir, ce n’est pas de prendre les ordures en vrac et de les mettre quelque part. Parce que si on fait disparaître Mbeubeuss, en continuant dans le même processus, on recule le problème, on ne le résout pas. On va créer un autre Mbeubeuss parce que tant que les ordures arrivent en vrac, il faudra bien qu’on les mette quelque part. L’avenir de la gestion des ordures, c’est le tri. On a calculé qu’a Joal, quand vous trier les ordures, le reste qu’on doit laisser dans une décharge contrôlée, constitue moins de 5% des ordures ménagères qu’une famille produit. Les chiffres ne doivent pas trop varier à l’échelle nationale.
Donc, il faut que l’Etat du Sénégal prenne une décision courageuse. C’est de faire le tri et la valorisation. Les gens qui se tuent à Mbeubeuss doivent pouvoir faire de la valorisation, mais pas dans les conditions insalubres de Mbeubeuss. Mais il faut que les populations apprennent à faire le tri. C’est l’avenir de la gestion des ordures ménagères.
Réalisée par La rédaction
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