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Téranga Nature

La forêt qui cache l’arbre ? En Afrique, un quart de la couverture arborée se situe en dehors des forêts

La forêt qui cache l’arbre ? En Afrique, un quart de la couverture arborée se situe en dehors des forêts

Repérer les arbres un par un, c’est désormais possible grâce à un réseau de satellites qui captent des images de la Terre avec une résolution plus précise, analysées à l’aide de l’intelligence artificielle. Une étude basée sur cette nouvelle méthode révèle que 29 % de la couverture arborée du continent africain se situe en dehors des forêts. Ces travaux pourraient contribuer à la lutte contre la déforestation.

Ce n’est peut-être pas l’arbre qui cache la forêt, mais les forêts qui masquent en réalité l’existence des arbres situés hors de leur lisière. La lutte contre la déforestation nécessite de calculer et surveiller la couverture arborée dans le monde. Mais jusqu’à présent, de telles analyses se fondaient sur des images satellites dont la résolution, entre 10 mètres et 30 m, demeurait trop basse pour repérer les arbres en dehors des forêts.

Une nouvelle étude, publiée dans la revue Nature Communications, annonce néanmoins un changement de paradigme. Les auteurs, des scientifiques de l’université de Copenhague (Danemark) et leurs collègues français et américains, ont basé leurs travaux sur PlanetScope. Il s’agit d’une constellation de nanosatellites qui orbitent autour de la Terre pour capter des images avec une résolution très élevée (3 m), expliquent-ils.

L’intelligence artificielle pour mieux repérer les arbres

Si la résolution de 3 m constituait déjà un atout par rapport à la plupart des images analysées jusque-là, elle restait toutefois insuffisante pour bien distinguer les couronnes des arbres – différenciés des buissons et des arbustes par la présence d’une ombre indiquant une hauteur de plus de cinq mètres. Les chercheurs ont donc utilisé un modèle d’intelligence artificielle (deep learning ou “apprentissage profond”) afin d’aboutir à une résolution d’un mètre.

L’étude, consacrée au continent africain, offre ainsi un éclairage inédit sur ces grands végétaux qui fournissent le gîte et le couvert à une myriade d’autres espèces animales et végétales. Elle conclut qu’en 2019 (date des images analysées), 29 % des arbres se situaient dans des espaces non catégorisés comme des forêts, c’est-à-dire possédant moins de 25 % de couvert arboré. Des champs ou des prairies, par exemple – voire des déserts.

Précision importante : avec une définition plus large du mot “forêt” (plus de 10 % de couvert arboré, selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture – FAO, citée dans l’étude), la proportion de couverture arborée située en dehors de celles-ci tombe à 5,2 %. Ce qui reste significatif. “Les frontières physiques séparant les forêts des zones non forestières sont relativement claires dans l’hémisphère nord. Cependant, de nombreux paysages africains sont des zones arides, où les arbres hors forêt constituent la principale forme de végétation ligneuse”, souligne l’étude, énumérant plusieurs types de paysages boisés autres que la forêt, notamment la savane et le bush.

Gérer la ressource en bois et détecter l’abattage d’arbres isolés

Les auteurs calculent que dans neuf pays africains – Botswana, Burkina Faso, Erythrée, Libye, Mali, Namibie, Niger, Mauritanie, et Soudan –, les arbres situés hors des forêts constituent plus de la moitié de la couverture arborée de leur territoire respectif. “Cela signifie que les cartes précédentes de couverture arborée à résolution modérée sont peu utiles pour quantifier les ressources ligneuses (en bois) de ces pays”, insistent les auteurs.

Ces travaux pourraient par conséquent s’avérer utiles dans des domaines tels que la surveillance de la biomasse, la biologie de la conservation, l’écologie du paysage, ou encore la sylviculture durable. “À l’avenir, la même méthode pourrait constituer un outil précieux pour un programme mondial de surveillance du couvert arboré, suggèrent les auteurs. Un tel cadre améliorerait considérablement notre capacité à détecter et à cartographier les changements (…) en élargissant les systèmes existants de surveillance de la déforestation, au point de pouvoir suivre l’abattage d’arbres isolés et de bosquets.”

G&O