Après la COP27 sur le climat, une autre COP majeure s’ouvre ce mercredi 7 décembre. Il s’agit de la COP15 sur la biodiversité, présidée par la Chine mais organisée au Canada pour des raisons sanitaires. Décrite comme la COP de la décennie, elle doit fixer de nouveaux objectifs au niveau mondial pour enrayer la perte de biodiversité à l’horizon 2030. Novethic vous aide à y voir plus clair.
La COP15 Biodiversité, c’est quoi ?
Si les COP pour le climat commencent à être (un peu) connues, leurs corollaires sur la biodiversité restent en revanche largement en dehors des radars, médiatiques notamment. Pourtant, ces deux COP, ou conférence des parties, sont nées en même temps, lors du Sommet de la Terre de Rio, en 1992. La COP15 Biodiversité est donc la 15ème conférence des 196 parties (195 pays + UE) à avoir ratifié la Convention sur la diversité biologique (CBD), un traité international juridiquement contraignant qui a trois principaux objectifs : la conservation de la diversité biologique, l’utilisation durable de la diversité biologique et le partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques. Le sommet était initialement prévu en octobre 2020 en Chine, mais a dû être reporté en raison du Covid-19. Il a finalement été scindé en deux. La première phase s’est déroulée virtuellement en octobre 2021. La seconde phase débute ce mercredi 7 décembre à Montréal, où se trouve le siège de la CBD, mais toujours sous présidence chinoise.
Quel est l’enjeu de la COP15 ?
La COP15 doit déboucher sur un nouveau cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020, dont le but est d’enrayer la perte de biodiversité au niveau mondial d’ici 2030, afin de “vivre en harmonie avec la nature” à l’horizon 2050. Ce cadre doit succéder aux Objectifs d’Aichi adoptés en 2010 au Japon, mais dont pratiquement aucun n’a été rempli. Pour de nombreux observateurs, cette COP est donc aussi importante que la COP21 pour le climat qui avait vu naître l’Accord de Paris. “En sept ans, l’agenda net zéro est méconnaissable et l’élan est clair. Nous avons besoin du même élan pour protéger toute vie sur Terre”, explique Laurence Tubiana, présidente de la Fondation européenne pour le climat et l’une des architectes de l’Accord de Paris.
L’objectif phare de 30% de protection des terres et des mers d’ici 2030 est-il suffisant ?
Cet objectif est en effet relayé par la société civile et soutenu par une coalition de plus de 110 pays dans le cadre de la Coalition de la haute ambition pour la nature et les peuples (HAC Nature) que la France co-pilote avec le Costa Rica et le Royaume-Uni. Mais il est aussi controversé, car il n’existe aujourd’hui pas de consensus sur une définition globale des aires protégées assurant une réelle protection. Celles-ci pourraient aussi constituer une menace pour les peuples autochtones, aujourd’hui garants de 80% de la biodiversité mondiale. Et quid des 70% d’espaces restants ? “Il ne faut pas se focaliser sur le seul objectif de 30% de protection. Je préfère un accord à 25% de protection avec des éléments structurants adoptés à côté”, tranche Sébastien Treyer, le directeur général de l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri).
Quels sont les autres objectifs à suivre ?
Le texte débattu à Montréal compte 23 cibles, réparties autour de quatre grands objectifs que sont la conservation des écosystèmes, leur utilisation durable, la répartition des bénéfices issus de l’utilisation des ressources génétiques et les moyens de mise en œuvre. L’un des éléments importants des négociations portera ainsi sur la réorientation du système agroalimentaire, première cause de perte de biodiversité, avec l’instauration notamment d’un objectif de réduction des pesticides. Le nouveau cadre doit également mettre l’accent sur la restauration des écosystèmes dégradés avec là-aussi un objectif chiffré. Enfin, comme dans les négociations sur le climat, la question des financements va être clé. Selon l’ONU, les investissements dans la nature doivent atteindre 384 milliards de dollars par an d’ici 2025, soit plus du double des niveaux actuels. Il faudra aussi s’attaquer aux investissements néfastes pour la biodiversité qui s’élèvent à 1800 milliards de dollars par an.
Quelles sont les chances de réussite ?
Outre le contexte géopolitique tendu, l’organisation de la COP15 est assez chaotique, les relations entre le Canada et la Chine n’étant pas au beau fixe. La Chine, qui préside le sommet, n’a invité aucun chef d’État et le président Xi Jinping ne prévoit pas non plus de s’y rendre. Par ailleurs, aucune impulsion politique n’a été donnée à la COP27. Le dernier projet d’accord contient encore des centaines de propositions entre crochets, autant de points que les délégations nationales devront trancher pendant les deux prochaines semaines. À Montréal, il s’agit aussi de ne pas reproduire les erreurs du passé. “Il faut mettre en place un cadre de suivi avec des processus de rapportage et des cibles mesurables qui puissent embarquer l’ensemble des acteurs”, explique Juliette Landry, chercheuse au sein de l’Iddri.
AFP/NVTC